Oui ma poulette, c’est cassé.
Comme ta petite dent, là, cette incisive gauche qui ne demandait qu’à rester entière jusqu’à ce qu’elle tombe, un jour, pour laisser la place à une dent définitive…
Samedi soir, nous étions chez nous, soirée raclette avec 2 couples d’amis, et leurs enfants. Chacun un petit gars, le même prénom, 2 caractères différents. L’un, ton petit cousin, turbulent mais gentil, qui joue avec toi, qui te dit « tontion bébé » (attention bébé) et qui dit « oh! » quand tu tombes. L’autre, turbulent, mais pas bonne pâte, qui t’arrache les jouets des mains, qui te pousse, qui vérifie si on le surveille pour faire ses coups en douce. Vous dire que Monsieur Papa et moi sommes tranquilles c’est vous mentir. Mais les parents de l’infernal sont sévères, ils veillent, grondent, fort, et tout se passe plutôt bien. Même si je sens mon cœur se briser quand tu pleures subitement car ton nounours est malmené. Je gronde aussi, il te le rend, me lance un regard noir tandis que ton petit cousin (le gentil) te fait un câlin.
Et puis, à l’apéro, je file fumer une cigarette sur le balcon, et là, hop, tu te renverses un verre de jus de fruits sur ta robe. Pas grave, je monte vite te changer. Monsieur Papa grogne…
Et puis on mange, on rit, les gamins donnent surtout à manger au parquet tandis que ma fille distribue des miettes de pain à qui veut bien les prendre (je précise : après avoir mangé son repas, je n’affame pas ma fille).
Et puis je re-file fumer une deuxième cigarette, tout le monde papote, les enfants jouent. Et là, le drame………,Mademoiselle V en pleurs dans les bras de Monsieur Papa. Elle « galopait » à 4 pattes poursuivie par les 2 petits gars qui rigolent, elle aussi elle riait. Et tombe bouche ouverte sur le parquet. Ses petits bras pas assez alertes? Pas assez coordonnés en mode « course »? Bilan : une incisive cassée. En biais.
La soirée se termine, c’est la faute à pas de chance. Tout le monde préfère s’éclipser, les enfants sont fatigués, la mienne ne pleure plus mais son papa cherche un coupable. Ce sera moi : « chaque fois que tu es partie fumer, elle a fait une connerie ! Tu pouvais quand même mieux la surveiller, non? » …………….. Lui ai quand même rétorqué : « quand je m’absente il arrive une couille à notre fille, tu pouvais peut-être, toi, mieux la surveiller? Ou peut-être admettre que là, c’est la faute à pas de chance? Qu’aurais-je pu faire pour éviter qu’elle tombe? Où étais-tu, toi? A table? Servant du vin? Où aurais-je été? A table? Desservant les plats? Faisant le café? »
Appel à 23H à une amie médecin qui me répond de suite « si elle ne saigne pas/plus, que la dent ne bouge pas, qu’il n’y a pas de coupure, tu attends lundi et tu prends rdv chez un dentiste, ne t’affole pas ».
Voilà. Le dimanche fut pourri. Le lundi aussi. La dentiste qui a examiné Mademoiselle V a simplement acté qu’il manquait 25% de la dent, que ce n’était pas grave, que la gencive n’était pas touchée, qu’elle tomberait un jour comme toutes les autres pour être remplacée par la « bonne dent », que le bourgeon de la dent définitive est encore trop haut pour avoir été abîmé, qu’un abcès peut se former mais qu’elle n’y croit pas (1% de « chance » que cela arrive), que le cas échéant je dois revenir, que le souci est juste esthétique (quand elle rit aux éclats sinon on ne voit rien), qu’il faut se dire que c’est un accident très courant (1 enfant sur 2), que nous devons déculpabiliser car personne n’aurait pu l’empêcher de tomber comme ça, et qu’elle est juste un peu casse-cou et qu’elle fera sans doute attention la prochaine fois.
Je retiens notamment que même absente je suis coupable……… Que cette fois encore même sans chercher à me blesser, Monsieur Papa y est parvenu. Qu’il pense que je m’en fiche parce que je relativise et reste à peu près zen, et que je ne soulève pas la lèvre de ma fille pour montrer sa dent à tout le monde (dans le but de la rendre honteuse de quelque chose qu’elle ne comprend pas??? Je ne comprends pas pourquoi il fait ça).
Hier soir nous avons eu des mots durs l’un envers l’autre. Cette nuit il n’a pas cherché à me prendre dans ses bras. Et ce matin avant de partir pour Paris il n’a pas cherché à dialoguer calmement. Alors, quand il m’appelle ce midi pour me dire qu’il m’emmène avec lui la semaine prochaine, 3 jours, laissant notre fille à sa sœur pour que nous soyons seuls, à Paris, pour nous retrouver, j’avoue que je ne comprends pas trop. Sa façon de s’excuser, je suppose… Ou sa technique toute masculine pour me dire « je ne veux pas que nous nous perdions »?
En attendant, oui, j’ai pleuré sur ce petit bout de dent qui manque, que beaucoup ne verront pas, mais qui me hante dans mes rêves depuis samedi.
Ma poulette…. Un jour je t’expliquerai qu’il ne faut pas courir devant les garçons. Ni derrière…….